Le 20/01/2021

SOUVENIRS & NOSTALGIE. Thomas Le Gall. A l'impossible, lui est tenu

7 juin 2013. Se blinder face à l'opinion générale pour la réussite d'un projet d'apparence fou mais qui se révèle être un défi communautaire, identitaire et sportif: le HBC Cap Sizun est un joyau dans l'univers aseptisé d'un dogme d'une pensée fixe. Ce club, d'apparence coupé du monde, est en revanche plein d'entrain et de vie. Il combat un à un les préjugés pour tirer une force énorme par une solidarité et un esprit groupe à toute épreuve. Au coeur de cette machine humaine, Thomas Le Gall, 34 ans, est l'entraîneur des équipes fanions masculines et féminines du HBC Cap Sizun, promues en excellence régionale. Portrait d'un parcours hors du commun.

Depuis 2006, Thomas Le Gall est l'entraîneur des équipes filles et garçons senior du HBC Cap Sizun.   

Le HBC Cap Sizun a tiré une force d'une faiblesse originale. Ce paradoxe est lié à la réussite extraordinaire d'un club, qui est aujourd'hui cité en exemple car il fait partie des 10 clubs de handball en Bretagne (1ère ligue en France par ses licenciés), à avoir une équipe senior féminine et masculine, au niveau excellence régionale. Lié à un principe d'inter-communalité dès sa création en 1979, par Yannick Stéphan, le Cap Sizun s'est nourri et battu dans l'ombre pour son défi identitaire. L'extraordinaire ressource de l'endroit est un moteur pour tout être humain, qui franchit les premiers mètres de ce territoire. L'histoire s'écrit dans la valeur des femmes et des hommes qui la font. A la fin des années 70, l'Etat Français avait même été terrassé pour la première fois dans un passé récent par la solidarité d'une communauté devant le projet d'une construction d'une centrale nucléaire à Plogoff. " Il faut être convaincu que toutes choses sont possibles dans la vie si on s'en donne les moyens. Notre isolement géographique, on le cultive. Nous sommes très orgueilleux et fiers car nous nous n'avouons jamais battu d'avance quelque soit le prestige de l'adversaire. Cette année, nous avons fêté trois montées en senior (deux équipes féminines A et B, et celle masculine). En 3 ans, nous en sommes à six montées avec les seniors. En 2006, nous nous battions pour ne pas descendre en district".

Il le concède, Thomas Le Gall aurait pu entraîner ailleurs, par sa passion du handball. Comme il précise aussi il aurait sans doute été moins fort dans sa persuasion, son énergie et sa motivation. " J'ai grandi à Audierne. Mes racines sont ici. Pendant six ans, j'ai fait le trajet entre Brest pour mon travail et Audierne, pour ma famille, mes ami(e)s et le handball. Le HBC Cap Sizun dépasse le cadre sportif. Ca intègre un projet identitaire. Venir dans ce coin, rester pour un jeune au pays est porteur de sens et de valeur. Au Cap Sizun, tu ne peux être un simple consommateur comme dans une ville plus importante. Cet éloignement, ça aurait du causer notre perte et ça a fait notre force. Nous avons gagné plein de matchs à l'envie. Chaque victoire est fêtée comme un succès en coupe du monde. C'est complètement démesuré mais ça nous fait tellement de bien de célébrer à l'excès une performance sportive".

Des sacrifices pour venir jouer dans le club de ses racines

Le facteur sportif est une conséquence de l'aspect humain et émotionnel. Le rationnel est parfois mis de côté comme des joueurs qui font le déplacement de Brest pour les entraînements et match, de Paris en avion, ou même une "expatriée" Belge, qui a joué la ligue des champions Féminine (le top niveau Européen) et qui par amour du coin et pour un métier, a choisi de mettre ses qualités au profit du club Capiste. " Ca ne se limite pas qu'au sport. Dans notre vie, nous sommes très liés les uns aux autres. On s'entraide, on se soutient. On n'oublie jamais notre chance d'habiter dans ce paradis. Notre préparation d'avant-saison se fait sur la plage, filles et garçons liés, conclue par une partie de volley-ball et grillades. On responsabilise énormément les joueurs et joueuses. Nous avons 17 équipes au club, 6 équipes seniors, et 254 licenciés. Nous devons nous donner les moyens d'encadrer au mieux les jeunes. On joue maintenant dans une belle salle de sports mais nous nous entraînions avant dans une salle où il faisait - 1°, -2° en hiver. Le public est une de notre grande force. Chaque week-end, 400 à 500 personnes assistent à nos matchs. Ca crée énormément de lien social entre chaque individu. car notre devise est vraiment de se dire que chaque individu a une valeur haute et que ce tout forme un ensemble très fort".

Entraîneur de l'équipe féminine et masculine, Thomas Le Gall est bénévole à 100%, plus lié à rendre au Cap Sizun ce qu'il lui a apporté dans son épanouissement personnel. " Bien-sûr que je peux quitter le Cap Sizun, ça peut me titiller par fierté. Je suis un fervent défenseur de mon territoire. Nous avons des valeurs fortes. De l'extérieur, ça surprend. Combien de fois j'ai entendu que je ne tiendrais pas à ce rythme-là depuis que j'ai relevé le défi en 2006 de m'occuper des équipes senior garçons et filles. J'écoute, je réponds poliment et ça me transmet une force supplémentaire de croire en notre capacité. Nous n'avions pas confiance en nous avant. Les joueuses et joueurs ont pris conscience de leur valeur mais ils n'ont jamais trahi un état d'esprit. Nous sommes comme le village retranché d'Astérix et Obélix au milieu de clubs, bien mieux munis à tous les plans. Il nous faut avoir une âme supplémentaire pour nous imposer. Et la valeur du groupe, de l'être humain est une matrice forte".

A 34 ans, Thomas Le Gall a accepté ce rôle de leadership des équipes seniors en 2006 parce que personne ne voulait le faire. En étant convaincu du potentiel énorme, qui se dégageait de ces habitants, il a crû en l'impossible, faire du Cap Sizun, une place forte du handball en Bretagne,en moins de 10 ans. L'exploit n'est pas mince. Ce qu'il croyait à ses débuts, sans l'avoir expérimenté, a été confirmé sur le parquet avec une ascension exponentielle sur les dernières années. A la rentrée sportive, Thomas Le Gall prendra du recul sur l'équipe garçons, confié à Pascal Bronnec, l'entraîneur d'Ergué-Gabéric mais il continuera à coacher l'équipe féminine. Toujours gravé par la maxime du club, à l'impossible, le Cap est tenu.

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