Le 16/12/2014

US Concarneau. L'importance du moment

Compresser dans un temps réglementaire de 5.400 secondes, un match de football se révèle être une redoutable mécanique de l'esprit et du corps. Un sablier de minutes qui se décompose d'une manière tripartite: mener, être à égalité ou être mené en match. Ce trident factuel accompagne une logique carthésienne et rationnelle. Cependant, cette raison est dépassée par la passion quand une équipe comprend l'importance du moment en football. L'Italie a toujours été un pays maître dans cette perception de savoir quand planter la banderille dans une rencontre, en feignant de faire croire à l'adversaire, que son niveau était égal, voir supérieur. C'est même une certaine forme de génie Machiavélique du football! En passant un palier dans son exigence, l'US Concarneau (CFA) est dans une dynamique similaire, sachant que le temps est une affaire d'accélération et une projection instantanée sur l'action en cours ou suivante. Certaines secondes sont plus importantes que d'autres en match. Et Concarneau use parfaitement de cet état de fait. Explications.

Ce samedi soir, face au FC Nantes B plus que le but de Christophe Gourmelon, sur un corner de Vincent Richetin à la 51ème minute, c'est la scène précédante qui m'avait interpellé et donné des pistes de reflexion à cet article. A l'origine, une grosse occasion Concarnoise, avec un centre en première intention de Vincent Richetin, Herman Koré se jette et bute sur le portier Nassim Badri. En embuscade, Christophe Gourmelon suit l'action. Sa frappe est contrée en corner par un pied Nantais. Le gardien visiteur semble touché. Il est au sol entouré de six coéquipiers. Or, le comportement des Concarnois était symptomatique de leur état d'esprit général.

Tous placés dans la surface de réparation ou à ses abords pour le corner à venir, à attendre que le Nantais retrouve ses esprits. En d'autres termes, ils étaient en projection de l'action à venir. Celle qui s'était déroulée, avait déjà été "zappée" de leur cerveau, quand elle aparaissait encore bien présente aux Nantais. Quand Vincent Richetin armait sa frappe, les Concarnois avaient au minimum 30 secondes d'anticipation et de concentration supplémentaire sur leurs adversaires. Le but n'était qu'une conséquence. La cause énonçait une capacité supérieure à être dans l'importance du moment. 

Une musicalité différente du match

Révélatrice d'un caractère, l'US Concarneau est dans une action permanente et constante en match. Rassurée dans sa globalité, l'équipe n'en est que plus efficace sur ce cumul de détails. Les clubs Italiens ou la sélection Azzuri ont dominé l'Europe du football en appliquant à la lettre ce schéma de pensée. Bien souvent, les analyses d'après-match tournaient autour de la non-supériorité de la formation transalpine. Par contre, le résultat final allait presque toujours dans un sens favorable aux Italiens. Plus que quiconque, il maîtrisait cet aspect psychologique du football, qui détermine une victoire ou une défaite. A la finale de la ligue des Champions, à Athènes, en 2007, des tribunes, j'avais été frappé par un joueur, Pippo Inzaghi. Sa capacité à précéder le moment touchait à l'instinct émotionnel. A 34 ans, Il était invisible dans le jeu, presque inoffensif pour les joueurs de la Mersey.  Au final, il ressortait avec un doublé comme le héros d'une finale décevante alors qu'il avait perdu 95% de ces duels avec les défenseurs Britanniques (1-2). En tribune aussi, les tiffosis Rossoneris dénotaient par une musicalité différente des Anglais. Les supporters des Reds chantaient de la 1ère à la 90 minute. Les Milanais, en infériorité numérique, concentraient leur chant sur une durée de 15 à 20 secondes. Forcément retentissant, le moment toujours bien choisi pour marquer l'adversaire et booster la détermination de leur protégés, ils étaient beaucoup plus sensibles à donner tout sur une courte période, décisive au résultat final, qu'à s'époumoner en vain sur la totalité des 90 minutes. Ce comportement était en symbiose sur le terrain avec les joueurs du Milan AC. 

Nicolas Cloarec, le coach Concarnois, est un être constamment projeté dans sa vie sur le moment présent et celui à venir. " Les réunions d'anciens combattants, à brasser de la nostalgie, ne m'intéressent pas. Le moment présent et celui futur accapare toutes mes pensées". Dans son expression s'incarne aujourd'hui parfaitement les valeurs de ses joueurs. En match, les Concarnois ne donnent jamais le sentiment d'être abattus. Ils sont sûrs de leur force et de leur capacité à gagner au bout des 90 minutes. L'attitude affichée face à Vitré en coupe de France ou le leader FC Nantes B en championnat est un miroir de leur solidité mentale. Cette équipe Concarnoise peut être dominée dans le jeu mais elle sait faire bloc pour attendre les périodes dans un match où les secondes valent plus chères que d'autres. Une telle attitude générale marque la force de ce groupe. Rejaillissant sur l'ensemble du club Thonier, qui met en place une identité commune dans toutes ces catégories d'âge pour avancer ensemble.

Christophe Marchand

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