Le 23/12/2020

DANS LE RETRO : GARGAMTUESQUE!

Victime d'une rupture des ligaments croisés du genou avec Locminé, la veille du match de coupe de France contre le Paris Saint-Germain, sur le synthétique du Moustoir, Killian Gargam, 22 ans, a pris une superbe revanche sur la "vieille dame" en s'inscrivant comme un des grands bonhommes de cette aventure extraordinaire vécue par l'US Concarneau. Auteur des deux buts venus d'ailleurs, mardi soir, face à Guingamp (L1), il revient sur ce match d'exception, après quelques jours de recul. Portrait découverte.

Auteur de deux buts face à Guingamp, Killian Gargam a vécu le meilleur moment de sa vie de footballeur, ce mardi 21 janvier 2014, à Guy-Piriou. Crédit photo: Patrick Tellier.    

La déesse coupe de France choisit ses héros! Ceux qui feront les titres de l'actualité dans les médias, et qui aimanteront la conversations des gens. Killian Gargam, remplaçant face à Guingamp, entré après l'heure de jeu, à la place du Rospordinois, Thibault Sinquin, a véritablement surmonté son destin pour se forcer un chemin dans l'histoire d'un club. Il restera à jamais comme celui qui a fait trembler les filets de Mamadou Samassa, porté par une foule de 6200 spectateurs en délire à ces moments-là. " A 20 ans, j'avais décidé de tout plaquer, d'arrêter le football tellement j'avais été dégoûté par mon coach en CFA avec le FC Lorient. Quand on atteint ce niveau, on rêve tous de faire une carrière professionnelle. Pendant trois mois, je ne voulais plus entendre parler de football. Jusqu'en octobre ou novembre, où je m'engage avec Locminé. Deux mois après, je suis en passe de jouer contre le Paris Saint-Germain. Je vis un vrai rêve, et la malchance revient avec une rupture des ligaments croisés, sur le dernier entraînement au Moustoir, à la veille du match. Même si j'étais sur le banc, j'étais effondré, mais mes partenaires avaient sorti un énorme match face à Paris".

Deux buts venus d'ailleurs

La rage mise à contribution sur ses deux buts, la volonté de s'élever au-dessus de cette guigne. Killian Gargam a ressenti une violente éruption interne de tous ces sentiments enfouis et accumulés, depuis des années, et qui sont ressortis instantanément sur ces deux buts. " C'est incroyable! Je n'ai jamais vécu cela. J'étais au-dessus du stade. C'est impossible à décrire. J'étais énervé car j'étais remplaçant. J'avais compris sur la mise en place de vendredi, que je ne commencerais pas. J'avais faim! Sur mon premier but, quand je vois Steph' (Quemper) centrer, je n'ai qu'une priorité, passer coûte que coûte devant mon défenseur. Si je ne le fais pas, je me donne aucune chance de concrétiser notre travail collectif. J'y arrive, je sens que j'ai bien pris la balle de la tête. Je ne réalise pas de suite. Quand je tombe au sol, je vois la balle au fond des filets. Tu es transporté dans un autre monde. C'est tellement magique! Tu réalises que tu as rendu des milliers de gens heureux sur un geste. Dans un tel match, tu ne sens pas la fatigue. Je finis avec des crampes, mais on ne les sent même pas. On court, tout le temps, sans jamais s'arrêter".

Son deuxième but est un récital. Une action de classe, dictée par les lois du jeu et le talent individuel. Le jeu demande une adaptation totale. Dès que le niveau s'élève, celle-ci se doit d'être immédiate. Le temps de décision est réduit à quelques dixièmes de seconde, d'où l'importance de prendre l'information avant de recevoir la balle. Une donnée que Killian Gargam avait en tête à la 99'. " Ma première intention est de poursuivre sur le côté ouvert, à gauche. J'ai vu mon partenaire, avant de recevoir la balle. Je sais où je vais la donner. Mais Lionel Mathis, le capitaine Guingampais, me surprend car il va au duel direct. Je ne peux que le dribbler sinon je perds la balle. Après, pour être franc, j'entends le public. Je me dis qu'il y'a un coup à faire. Je continue, je suis à la lutte avec Diallo. Je pense qu'il va stopper l'action par une faute mais il essaie de gagner le duel à l'épaule. J'y vais, jusqu'au dernier moment, je pense qu'il va contrer la balle avec sa jambe. Elle part! Je suis face à l'action. Lunette! Après, c'est une joie immense car on pense pouvoir donner la qualification au club"

Ces deux buts venus d'ailleurs resteront comme un canevas de la nouvelle identité de l'US Concarneau, qui a pris le virage de la formation et de l'identité locale dès 2004. Ce match est la récompense d'une politique de réflexion interne, qui s'appuie sur un savoir-faire et une envie d'être à contre-courant d'un schéma actuel proposé: des joueurs-clubs sans contrats fédéraux, fidèles aux valeurs humaines et qui s'inscrivent dans un projet social et sportif. L'US Concarneau a perdu un match de football mais il a gagné en 120 minutes une estime et une adhésion de tous les observateurs, qui savent aujourd'hui que ce club est dans le vrai, à condition d'être suivi et soutenu par les partenaires institutionnels et privés, à moyen et long terme.

25 ans d'attente comblé en 2013/2014

Grand ami de son coéquipier, Guillaume Gégousse, avec lequel il a grandi à Ploemeur, et au centre de formation du FC Lorient, Killian Gargam est apaisé aujourd'hui car il a trouvé un club qui correspond à ses valeurs. " Avec Guillaume, on se connaît depuis le berceau. Nos deux pères ont joué au football ensemble. J'ai une photo que ma mère m'a montré sur laquelle est inscrit quand j'avais 4 mois, Killian avec son grand copain Guillaume. Nous avons un an d'écart. C'est lui qui a parlé de moi à notre entraîneur, Nicolas Cloarec. Dès le premier mois de préparation, j'ai vraiment eu un bon feeling. Je l'ai dit de suite que nous formions un super groupe. Ca me change du FC Lorient où il y'avait plus d'individualisme. On ressent beaucoup plus de solidarité, à Concarneau. Je me vois très bien rester dans ce club. Je ne connais pas trop la ville comme j'habite et travaille sur Lorient mais à chaque fois, qu'on descend en ville, l'accueil est très chaleureux. Le foot pro? Je n'ai pas fait une croix. Je ne m'enflamme pas! L'important est de faire une bonne fin de saison. Nous aimons tous le football et le haut niveau. Si l'occasion se propose, je ne refuserais pas. C'est ma passion et mon rêve d'enfance de passer pro, un jour".

A l'aise sur tout le côté droit, au poste de latéral ou de milieu, Killian Gargam, 22 ans, après quelques années au centre de formation du FC Lorient et un an et demi à Locminé, a trouvé en Concarneau, le club qui lui a amené une quiétude intérieure et une joie retrouvée de jouer au football de haut-niveau avec des potes. Le football amateur de haut-niveau, à Concarneau est une affaire de passionnés, qui doivent pour exercer leur passion, passer par des sacrifices horaires, quatre entraînements par semaine, de longs déplacements, le week-end et un travail ou des études en semaine. Tous ces efforts et cet amour du jeu ont trouvé une pleine récompense, ce mardi 21 janvier 2014, face à Guingamp. Dans le Sud-Finistère, nous n'avions plus connu un tel engouement populaire, depuis l'année 1987/1988, et ce quart de finale du 10 mai 1988, Quimper (D2) - Metz (D1) remporté par les Cornouaillais sur un but de Didier Monczuk ou le match des 32ème finale à Penvillers FC Pont l'Abbé (D4) - SM Caen (D1), en janvier 1992 (0-2).

25 ans après, l'US Concarneau et le FC Quimperlé ont fait à nouveau vibrer des milliers de personnes, à travers leur aventure en coupe de France 2013/2014. Killian Gargam de l'US Concarneau et Julien Le Gall du FC Quimperlé resteront comme les deux grands buteurs de cette aventure unique des deux clubs. Tous ces jeunes, qui étaient au bord des terrains, auront en mémoire ces moments fabuleux. Et parmi eux, peut-être quelques uns vivront dans le futur, également ce moment magique pour tout footballeur amateur ou professionnel de la coupe de France.

Christophe Marchand

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