J'avais dans l'idée que le régime alimentaire du traileur se réduisait aux barres de céréales aux graines de courge. Et les graines, ça me donne la nausée ! Moi, si je cours (très peu), c'est juste pour me donner bonne conscience quand j'ai forcé sur le chocolat sans cacao, les biscuits bien sucrés et les frites hyper grasses. Pour confirmer mes préjugés diététiques, je suis allé interroger à l'arrivée de l'Urban Trail de Douarnenez, toute une palette de traileurs et de traileuses, les vainqueurs mais aussi les anonymes du peloton, des jeunes et des moins jeunes, des minces et des moins minces... Tous réunis autour d'une seule et même question : Au quotidien, suivez-vous un régime alimentaire strict en rapport avec la course à pied ? Croyez m'en si vous voulez : à une ou deux exceptions près, je ne suis tombé que sur des contre-exemples, des coureurs et des coureuses qui ne s'astreignent à aucun régime sévère particulier. Bien sûr, tous ne se bâfrent pas non plus la veille de la course mais on aime bien vivre dans le peloton... Dans le détail, voici ce que ça donne.
 

Légende: La préparation ne se fait pas qu'en alignant des séances dans la semaine, mais aussi dans l'assiette. Là, encore, c'est une formule composée pour beaucoup. Crédit photos: DR

A tout seigneur, tout honneur, c'est vers le longiligne Alexandre Audo double vainqueur de l'épreuve que je me suis d'abord tourné. Je peux bien le dire, je l'aime bien Alex. Pour le correspondant sportif en quête d'un petit commentaire, c'est la crème des crèmes, le gars qui n'oublie jamais de vous demander comment vous allez. Le gars avec lequel vous iriez bien échanger autour d'une bonne bière. Râpé ! Notre homme ne boit jamais une goutte d'alcool. "Non, jamais ! Pas plus de boisson sucrée d'ailleurs. Et pour l'alimentation avec Caroline et les enfants on fait très attention, la base ce sont les pâtes et les légumes. Jamais de plats tout faits."  Et devant mon air déconfit. "Mais rassure-toi, on est des gourmands !" Sauvé ! Un jour, on ira se goinfrer de chocolat (au cacao mais pas trop pur) ensemble...

J'ai abandonné Alexandre pour Victoire. Victoire Alzan, la kiné du centre de rééducation de Tréboul. Encore une fille bien. Et dans la conversation, il se passe toujours des trucs inattendus avec Victoire. Ma question l'a fait sourire, sa réponse ne m'a pas déçu. "Je pratique le jeûne intermittent." Devant mon air tout à fait déconfit cette fois. "Je ne mange que le soir mais à ce moment là je ne me prive pas. Mon péché mignon ? Une bonne platée de grosses fritasses ou alors des cacahuètes, j'adore ça les cacahuètes." "Et question alcool ?", ai-je avancé prudemment. "Je ne me refuse pas un verre de vin ou une bonne bière la veille d'une course. Attention, je ne vais pas non plus me mettre une mine..."

On progressait ! Et puisque Dimitri Gning, le Brestois victorieux du trail court dont la mère habite à 500 mètres du stade Jean Lesteven passait par là, j'en ai profité pour lui tendre le micro. "Faire attention à l'alimentation ? A quoi bon ! Pour prévenir les blessures, je joue plutôt sur la variété des sports pratiqués. C'est pour cela que je fais du triathlon d'ailleurs." "Et puis a renchéri le Plouhinecois Romain Hellou qui prépare l'Ironman de Nice, si on s'interdit les soirées entre copains, c'est le mental qui est affecté. Et en sport, le plus important c'est justement le mental. D'ailleurs, je vais de ce pas boire une bière."

Alain Lavoux, le président des Semelles Douarnenistes, ne voit pas les choses autrement. Pour lui, comme j'en ai l'impression pour tout le club des Semelles, c'est Ni Dieu ni maître ! "Je n'aime pas plus les contraintes liées aux plans d'entraînement que les régimes alimentaires trop stricts." Bernard, éminent marathonien des Semelles a confirmé. "Je limite quand même l'alcool. Trois semaines avant un marathon, plus une goutte." Après ? Je n'ai pas demandé. J'ai encore croisé Séverine Ropert du Club Athlé Plaisir Douarnenez, qui si j'en juge par son mouvement d'épaule réprobateur, a eu l'air de trouver ma question incongrue. "Si, une fois j'ai fait appel à une nutritionniste pour préparer un 100 kilomètres", a t-elle consenti à m'avouer.

Mais c'est avec Christophe Stéphan qui court sous une double casquette (Termaji's et Défi Matthieu Craff) que toutes mes fausses certitudes se sont écroulées. "Tu sais toutes ces histoires de sucre lent et de pâtes à avaler la veille de la course, c'est dépassé. tu peux très bien manger une pizza la veille, ça ne changera pas grand-chose à ton résultat." Je tournais déjà les talons, il m'a rattrapé. "A condition quand même d'avoir de manière générale, une alimentation équilibrée." Cela va de soi ! je ne sais pas vous, mais moi tout ça m'avait donné soif et avec Pierre on est allés s'en jeter une.

Rubrique Carte Blanche à Marc Férec

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