Vincent Nolorgues: " Le football amateur est un des derniers tampons dans notre société française"
36.000 communes approximativement en France, 11.726 clubs de football, soit pratiquement 1 commune sur trois en France qui possède un club de football, c'est dire l'ancrage massif et la représentation de ce sport dans la culture française. Pourtant, l'adage consensuel, est que nous ne sommes pas un pays de football, mais ce retour à la base marque toute l'empreinte de ce football amateur, dans le tissu social de la nation. Président de la Ligue Amateur de football, Vincent Nolerbes était dans le Finistère, ce mercredi, pour mettre en avant ce football amateur, et rappeler son importance primordiale et tout son poids dans la société française. En Bretagne, où ce football amateur est vécu comme une deuxième religion ( voir la première), il prêchait pratiquement que des convaincu(e)s.

Légende: Après sa journée dans les Côtes d'Armor, le Cantalou, Vincent Nolergues, président de la ligue amateur de football ( créé en 1995 à la demande des districts et des ligues) faisait étape dans le Finistère, ce mercredi.
La fédération française de football représente 2.227.000 licencié(es), 25.000 de plus que l'an dernier, si la dissociation est faite avec les pros et les amateurs, ce décompte final est presque inchangé.
" On ne doit avoir que 1.000 joueurs professionnels, 600/700 évoluant en France pour 50 clubs professionnels. Le football amateur représente le reste. Mais ce football professionnel absorbe tous les effets médiatiques, un match professionnel est vécu comme de l'évènementiel, similaire à une tournée de Johnny Hallyday, alors qu'un match amateur, on est plus dans la chorale de village. Ce ne sont pas des éléments comparables. Les joueurs professionnels sont d'ailleurs très reconnaissant envers le football amateur. Beaucoup de joueurs reversent à leur club de départ, notamment les primes reçues en coupe du Monde. La réalité est que ce monde amateur a besoin des pros. 70% du buget de la FFF (274 M€) provient des droits TV (26%) et des partenaires privés (42%). 2,5% de ce budget est bloqué pour le football amateur, notamment 18,7 M€ dans le FAFA ( fond d'aide pour le football amateur)", soutient Vincent Nolorgues.
Cette captation des richesses par le haut fait-elle son effet de ruissellement par le bas? Oui, répond-on par le haut, non leur rétorque-on par le bas. Entre ces deux footballs, qui ne se comprennent plus, le football amateur est celui qui plie mais ne rompt pas. " Le football a changé. Dans la partie joueurs, éducateurs, dirigeants et arbitres, la présence est plus en pointillé. Il y'a parfois aussi un blocage dans les clubs, où les nouveaux dirigeants se voient confier des tâches peu valorisantes. Ce football de jouer et prendre l'apéro est tout à fait acceptable en senior, mais dès que ça s'élargit aux jeunes, il faut un minimum d'encadrement correct et de gens formés pour accueillir et développer le football"
L'incivilité autour des terrains de football a récemment fait les feux de l'actualité, y compris dans notre département du Finistère, mais le football, le sport dans sa globalité reste un vecteur d'intégration majeur, en France. " Lors des émeutes, en région parisienne, pour la mort d'un jeune homme, il y'a eu des écoles, des abris de bus, des voitures, de bâtiments incendiés, mais jamais un vestiaire de football n'a été touché. Dans certains quartiers, le football est même le 1er lieu d'éducation, devant la famille et l'école. En Bretagne, nous sommes sur un territoire préservé, tout comme dans le Cantal où je suis originaire. L'incivilité est un phénomène important, mais sur 1,5 million de matchs joués en France, à niveau amateur et jeunes, seulement 1,5 à 2% sont marqués par des comportements inappropriés, 98% se passe très bien".
Ancien rubgyman, jusqu'à ses 17/18 ans, Vincent Nolerbes, a eu un parcours étonnant, médecin pour le club d'Aurillac, jusqu'à en être le président du club. Médecin dans sa vie professionnelle, jusqu'à cet accident de moto, à 49 ans ( un an allité à l'hôpital) pour retrouver une partie de son intégrité physique, il a ensuite gravi les échelons de ce football amateur, président de district au Cantal, puis de la Ligue d'Auvergne, il défend ce football amateur en prenant la suite de Marc Debarbat.
" Ce qu'il faut défendre, ce sont les valeurs du sport. Le sport à la base, est bon pour la santé, ce n'est pas forcément vrai pour le sport professionnel. Le district est l'échelon de base de notre football, s'il n'y avait pas le football, il n'y aurait rien dans la vie d'une commune, le dimanche. Le phénomène est que les clubs se regroupent, on a toujours autant de joueurs ( baisse chez les seniors et U18), et d'encadrement, mais avant une équipe de 16 joueurs suffisait pour s'engager pour faire la saison maintenant, il faut 20 joueurs par équipe. Ce football est unique par son lien social. J'ai en exemple, un club par chez moi, dans le Cantal, ils sont 200 dans le village, il y'a deux équipes de football, dont une, c'est des salariés de Michelin, à Clermont-Ferrand, qui reviennent tous les dimanches, dans leur village de naissance, pour porter le maillot et se retrouver ensemble. Le football amateur est un de nos derniers tampons dans notre société. Vous devez en avoir aussi des étudiants ou des personnes qui travaillent sur Brest/Lorient ou Rennes, et qui reviennent dans le club de leur commune, le dimanche. C'est le football que je veux défendre à la fédération française de football, son rôle, sa richesse, son côté terroir. Un club de football qui arrête dans un village, ça touche les gens, il y'a une tristesse visible. Les clubs seront contraints de se regrouper, à l'avenir, mais avec le phénomène naissant de télé-travail, il y'aura peut-être un rééquilibrage de la démographie", estime Vioncent Nolorgues.
Facilement aveuglé par le haut, qui retire toute la lumière, ce football amateur concentre 99,999% des licencié(e)s, en absorbe finalement tout le jus et le charme qui peut se dégager de son ancrage local, et de toutes les ramifications sociales, qui en résultent, et comme cité auparavant, un élément fixe et attachant, qui nous rattache tous, à notre club de base (qui pour beaucoup encore reste l'unique d'un parcours de footballeur amateur).